Si vous lisez cette série d’articles, c’est aussi parce qu’en média training, la grosse difficulté, c’est de gérer la confrontation, c’est de gérer l’opposition. Et ce n’est clairement pas facile.
Cette confrontation ou cette opposition, elle peut être gérée de cinq façons différentes.
Nous verrons à la fin qu’elle est, à mon sens, la manière la plus efficace et la plus impactante de gérer cette confrontation avec l’autre, avec le public, qui ne pense pas, comme vous, ou encore avec les journalistes, qui essaient parfois de vous mettre en difficulté.
La première façon que l’on voit souvent en politique, c’est la réfutation frontale. Je n’ai aucun intérêt à être d’accord avec l’autre, à entretenir la relation et donc je vais frontalement l’attaquer, en disant par exemple : “Vos arguments ne sont absolument pas à la hauteur des situations difficiles que connaissent nos concitoyens.”
Vous voyez là, ce n’est pas nuancé. C’est la confrontation totale.
Dans la mesure du possible, on va l’éviter parce que généralement les intérêts que l’on a sont aussi importants que la relation que l’on a avec l’autre. À part en politique, là où il n’y a pas de relation avec l’interlocuteur.
Je vous déconseille fortement d’y aller en frontal.
La deuxième manière de faire, c’est le contournement.
Vous n’y allez pas en frontal, vous reconnaissez qu’il y a un peu de vrai chez l’autre, mais vous défendez votre point de vue : “Moi, je comprends tout à fait votre point de vue, ce que vous dites, mais je vous invite plutôt à considérer que…”. “Vous voyez, moi, de mon côté, j’entends ce que vous dites, j’estime que…”. “Je vous réaffirme ma position, en vous disant que…’
C’est une forme de défense musclée.
Vous n’attaquez pas frontalement, vous reconnaissez, vous contournez.
C’est une forme d’assertivité, puisque vous reconnaissez, que vous entendez, mais vous n’êtes pas d’accord.
Et au fond, vous êtes d’accord avec le fait que vous n’êtes pas d’accord.
La troisième façon de faire, et qui est très intéressante, c’est l’anticipation. Elle se base sur le processus de la réfutation.
Dans le discours classique de Cicéron, dont on a déjà parlé, je vais évoquer avant mon interlocuteur ce qu’il pourrait me dire pour exprimer un point de vue opposé.
Le fait d’anticiper les objections, c’est génial parce que beaucoup d’auteurs ont montré que ce qui est déjà dit une fois, à moins d’impact par la suite.
Si vous privez un orateur de l’intérêt de la nouveauté, vous diminuez l’intensité de son argument.
Donc si vous êtes capable d’anticiper les objections et de les exprimer en premier, avant qu’il n’ait à les exprimer, vous réduisez un petit peu l’intensité de son argument.
C’est ce qu’on appelle, l’anticipation.
Une autre façon que je ne recommande pas, c’est la défense passive.
Là, vous esquivez le sujet, vous faites comme si vous n’aviez pas entendu, vous parlez d’autres choses.
C’est par exemple, alors qu’on vous invite à parler d’un sujet sur l’économie, sur le pouvoir d’achat, vous répondez : “écoutez, je ne pense pas que ce soit le sujet qu’ont à l’esprit beaucoup de Français”.
Là, on est sur une défense passive qui est malheureusement souvent utilisée quand on demande aux candidats s’ils vont se présenter aux prochaines élections présidentielles.
Effectivement, c’est triste, c’est parfois risible, mais cette défense passive peut paraître être la seule solution quand on ne sait pas comment faire. On ne contourne pas. On évite, et c’est très souvent visible.
À mon sens, la meilleure façon de gérer la confrontation, c’est la contre-attaque.
Elle s’appuie sur la répartie et j’aimerais vous citer pléthore d’exemples de contre-attaque, qui permettent de faire mouche et de clouer le bec à cette personne qui essaie de vous attaquer.
Cette riposte oratoire à quelque chose d’assez saisissant.
C’est, par exemple, l’échange qu’ont eu, Winston Churchill et un dramaturge assez connu, Monsieur Show. Il a invité ce premier à se présenter à son spectacle, en lui disant ceci : “Veuillez trouver deux places, ci-joint, et venez ce soir avec un ami, si vous en avez un.” Churchill lui répond : “Ce soir non. Par contre, je pourrais venir à la seconde, si toutefois il y en a une.”
D’autres exemples : un noble qui s’adresse à Monsieur Thiers, qui a été un politique français, en lui disant : “De quel noble descendez-vous ?” de façon assez condescendante. Thiers lui répond : “Moi monsieur, je ne descends pas, je monte.”
Ou encore Jacques Chirac, qui au salon l’agriculture répond à une insulte d’un jeune, et il lui répond : “Enchanté, moi, c’est Chirac.” Belle manière là aussi de riposter.
Un autre exemple, toujours en politique, François Mitterrand qui fait face à un opposant politique communiste, dans le cadre d’élection. Cet opposant politique lui dit : “Je passerai comme une lettre à la poste.” François Mitterrand lui répond : “La Poste est fermée le dimanche.” Jour évidemment, des élections.
Ou encore un ministre qui demandait, et là ça remonte un petit peu, à Talleyran :”Comment vont les affaires en France ?” avec un air un peu vicieux, parce qu’il savait très bien qu’elles n’allaient pas très bien. Ce ministre louchait et Talleyran, lui répondit alors : “De travers, comme vous le voyez.”
Donc là, vous voyez, on est sûr des exemples de riposte, assez drôles, dont on peut s’inspirer.
La logique de la riposte, c’est de prendre l’énergie, de prendre ce qui pourrait être reproché et de s’en servir contre son interlocuteur.
Ces ripostes sont admirables, elles sont beaucoup évoquées, elles sont retenues, on les garde dans le temps et elles vous permettent de gérer la confrontation.
Voilà donc ces cinq façons de gérer, et de tester la riposte.
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